La position phobique centrale
André Green
Article paru dans la Revue française de psychanalyse, t. LXIII, n° 3, 2000, p. 743-771.
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Définition de la position phobique centrale
Par position phobique centrale, j’entends une disposition psychique de base du type phobique, qu’on rencontre souvent dans la cure de certains états limites. J’ai fait le choix de l’adjectif « central » afin de marquer l’aspect que je veux décrire du fonctionnement mental du patient. Je ne vise pas ce qui est considéré comme le plus profond des étages du fonctionnement psychique du patient, pulsion ou relation d’objet ni, à l’opposé, l’aspect rattachable au conscient à travers le discours du patient. Pas plus qu’il ne s’agit d’atteindre les niveaux de ce qui est supposé être le plus ancien ou le plus primitif. Ce n’est pas simplement de l’accession au conscient de certaines parts de l’inconscient du patient que je traiterai, mais plutôt des résonances et des correspondances entre certains thèmes qui se frayent un chemin à travers diverses voies venues du refoulé, menaçantes, non seulement eu égard aux sanctions du Surmoi mais aussi pour l’organisation du Moi. C’est pourquoi il faut empêcher le plein épanouissement de ces contenus dans le conscient et leur reviviscence complète. Ces thèmes, qui jalonnent l’histoire du sujet, se potentialisent mutuellement, c’est-à-dire qu’ils ne se contentent pas de s’additionner mais qu’ils s’amplifient par leur mise en relation les uns avec les autres. Ils affectent son fonctionnement psychique qui ne peut plus alors se contenter d’éviter ce qui refait surface isolément ou d’empêcher la résurgence du plus ancien ou du plus profond, puisqu’il s’agit aussi bien d’empêcher l’extension et la réunion qui relient les thèmes les uns aux autres. Le résultat global ne peut être compris par la référence à un événement traumatique singulier, si profond et si intense qu’il soit, mais par les rapports de renforcement mutuel entre des événements dont le regroupement créerait une désintégration virtuelle née de la conjonction de différentes situations traumatisantes en écho les unes avec les autres. C’est donc qu’il faut plutôt concevoir, dans la communication du patient, les condensations de ce qui se présente comme des plaques tournantes, affolantes, car elles deviennent le nœud de rencontres où s’entrecroisent différentes lignées traumatiques. J’aimerais préciser qu’il ne s’agit pas seulement d’empêcher le retour du trauma le plus marquant, ni de ce qui a été décrit en termes de traumatismes cumulatifs (Khan), mais de faire obstacle à l’établissement de relations entre les différentes constellations traumatiques dont la mise en rapport les unes avec les autres est ressentie comme une invasion angoissante par des forces incontrôlables. Le réveil de l’un quelconque de ces traumas pourrait entrer en résonance avec d’autres. L’image composite qui en résulterait serait impensable parce qu’elle déchaînerait une violence inouïe dirigée contre l’objet, mais surtout contre le Moi du patient. Il faut donc supposer que ce qui rend l’agglomération de ces thèmes très menaçante est qu’ils menacent les organisateurs fondamentaux de la vie psychique dont les défaillances sont susceptibles d’entraîner la catastrophe. Ce sont bien des piliers de la vie psychique qui sont touchés, le patient ayant réussi à les tenir séparés tant bien que mal ou à nier leurs rapports, avant l’analyse. Le vrai trauma consistera donc dans la possibilité de les réunir en une configuration d’ensemble où le sujet a le sentiment qu’il a perdu sa capacité intérieure de s’opposer aux interdits et n’est plus en mesure d’assurer les limites de son individualité, recourant à des identifications multiples, et parfois contradictoires, se trouvant désormais incapable de mettre en œuvre ses solutions défensives isolées. C’est pour cela que l’idée de centralité m’a paru la plus appropriée pour définir une situation « entre deux eaux », niveau intuitivement perçu par l’analyste comme étant celui où progresse le filon associatif, en butte avec ce qui fait obstacle à sa progression, à ses ramifications, à son déploiement vers la surface autant qu’en direction de la profondeur. Ce type de fonctionnement, qui témoigne de la fragilité de la capacité d’auto-investigation ou des effets périlleux de son exercice, a des conséquences si radicales qu’on ne peut expliquer le recours à ces mécanismes auto-mutilants pour la pensée que par la nécessité de parer à d’importants dangers d’effondrement. C’est pourquoi c’est encore la référence à l’effroi ou à la catastrophe qui semble le mieux correspondre à l’expérience du patient. Il serait ici justifié de parler, si cela était possible, d’une activation des traces mnésiques de terreurs diurnes profondément ensevelies mais toujours actives.
Le discours associatif en séance : un modèle
Pour bien comprendre ce que je veux dire, il est indispensable de montrer au préalable comment je conçois le fonctionnement d’une séance idéalement féconde. Partons du schéma du chapitre 14, « Premières notions du Moi », de la première partie de l’Esquisse (fig. 1). Dans cette graphie, Freud imagine un enchaînement d’unités supposées être des neurones et dont il décrit les assemblages selon deux cheminements. Ce qui entretient leur animation ce sont, dans sa terminologie, des quantités mouvantes. D’une part, l’investissement direct d’une quantité mouvante du neurone a vers le neurone b les met en rapport en raison d’une « attirance provoquée par le désir », d’autre part, une chaîne appelée par lui investissement latéral qui, partant de a se déploie, selon un trajet arborescent, vers d’autres neurones α, β, γ, δ. L’investissement latéral supplée à la voie a -> b, lorsque celle-ci est barrée, parce que susceptible d’entraîner du déplaisir. Freud parle en fait d’inhibition car le refoulement n’a pas encore été découvert. « Nous voyons aisément comment, à l’aide du mécanisme qui attire l’attention du moi sur un investissement nouveau de l’image pénible, le moi arrive quelquefois à arrêter le passage d’une quantité émanant de cette image et menant à une production de déplaisir. Il y parvient grâce à un investissement latéral considérable, susceptible d’augmenter quand les circonstances l’exigent[1]. » L’investissement latéral trouve donc une issue alternative à ces frayages inhibés. Je fais l’hypothèse que la relation entre a et l’investissement latéral substitutif α β γ δ doit avoir un rapport plus ou moins homologique avec le frayage inhibé a -> b ; de telle sorte que l’analyse de cet investissement latéral en relation avec a devrait nous donner une idée indirecte, fût-elle approximative, relative au rapport inhibé a b.
Je considérerai cette schématisation comme un modèle nucléaire réunissant l’investissement, la dynamique du sens, le refoulement et la résistance, ainsi que les associations comme mode de reconnaissance permettant l’abord médiatisé et partiel de l’inconscient refoulé. Je souhaite modifier le schéma pour l’appliquer au type de communication dans la séance. Quand la règle de l’association libre est observée au cours d’une séance fructueuse, le patient énonce des phrases qui se suivent sans lien logique. Dans cet ordre dispersé, on peut relever que chaque idée ayant une certaine consistance sémantique – je les appelle sémantèmes principaux – est entourée de commentaires circonstanciels que j’assimile aux investissements latéraux du schéma de Freud. Or les commentaires adjacents sont en fait les produits discrets du refoulement et de la résistance, surtout lorsqu’ils apparaissent comme fruits de l’association sans relation immédiate avec le thème abordé que nous désignons comme sémantème principal. Ces commentaires parfois servent de simples développements sur les sémantèmes principaux, jouant un rôle analogue aux propositions subordonnées de la grammaire et traduisent occasionnellement une difficulté à laisser s’associer directement un autre sémantème principal. Ce qu’il est important d’observer, c’est que l’association libre se sert des structures narratives ou grammaticales sans respecter leur ordonnancement hiérarchique, l’enchaînement du discours établissant des liens en ignorant la catégorisation en principal, subordonné, frayage direct et investissement latéral. La résistance oblige au détour, mais celui-ci, en revanche, enrichit les possibilités d’association et permet d’avoir, à travers cette médiation, une vague idée de ce qui ne peut être dit. C’est ce que montre rétrospectivement l’analyse d’une signification émergeant de certaines relations dégagées des différents éléments dispersés dans la communication. C’est donc supposer que le discours associatif, produit par l’association libre, pousse à des développements incidents pour empêcher l’établissement de liens trop immédiats avec l’inconscient et que les commentaires qui paraissent secondaires ou subordonnés sont susceptibles de jouer le même rôle que les investissements latéraux : c’est-à-dire que, à côté de leur fonction de détour, les chemins suivis entrent en liaison, en profitant de la baisse de la censure rationnelle, pour créer de nouveaux rapports apparus à la faveur de la mise entre parenthèses des catégorisations du discours.
Ceci est connu et admis par les psychanalystes qui, en général, ne vont pas plus loin. On a bien aperçu qu’une nouvelle trame de relations pouvait transparaître, mais les voies par lesquelles celle-ci se forme ont été laissées dans l’ombre. Si, pour le conscient, cet aspect décousu révèle une grande obscurité quant à l’intelligibilité d’ensemble, pour l’écoute analytique, la nouvelle trame laisse penser que des relations significatives existent entre n’importe quels éléments énoncés, qu’ils relèvent de deux idées sémantiquement consistantes ou d’une idée sémantiquement consistante avec n’importe quel autre aspect de la verbalisation, présent de manière incidente ou contingente, faisant partie des investissements latéraux énoncés ou rattachés par inférence. Ceci découle de l’hypothèse que j’ai soulevée, que les différents investissements latéraux devaient avoir un rapport avec la voie barrée qui ne peut être frayée, celle qui mène directement de a ->b.
Ce n’est là que le préalable de ce que nous avons à comprendre. Cette associativité nous invite à rechercher le sens latent en devinant que la compréhension d’un élément, supposons l’élément d, de la chaîne a, b, c, d, e, f ne peut dévoiler sa fonction par sa seule référence présumée avec celui qui le précède c accompagnés de leurs sémantèmes subordonnés, selon une progression linéaire. Plus précisément, il faut ajouter que c sera infiltré, habité, potentiellement grossi des relations réflexives qu’il aura pu entretenir avec un ou plusieurs éléments contingents d’une autre chaîne distante de lui, soit avec ses investissements latéraux, soit avec un élément précédent appartenant à la série des idées sémantiquement consistantes. L’idée générale est que le sens inconscient, dans sa poussée vers la conscience, cherche à se frayer un chemin et doit, pour être dégagé, passer par des liaisons qui ne mettent pas en contact direct les éléments qui entrent dans sa composition ou que ceux-ci ne peuvent être déduits par de simples rapports de proximité immédiate, en négligeant ce qui semble ne jouer que la fonction de digressions. Bien entendu, les affects jouent le rôle le plus important dans cette diffraction, ces dérivations, ruptures ou enchaînements. On aurait tort cependant de penser que le marquage des affects suffirait à orienter clairement vers ce qui doit conduire à la signification latente. Car les affects peuvent surgir comme une conséquence du démantèlement associatif et n’avoir pour fonction que la connotation d’un aspect du discours apparu, en cours de route, sans pour autant jouer un rôle important sur la trame significative mise en évidence grâce au travail associatif.
On voit que cette forme de pensée ne fait pas que rechercher un relâchement de la censure mais qu’elle induit un fonctionnement délivré des contraintes de la mise en séquence de mots en succession logiquement catégorisée, faisant jouer l’attraction (et la répulsion qui l’accompagne) des éléments refoulés qui commandent la production du discours. La demande d’association libre a une double conséquence. Si d’un côté elle amène à renoncer aux contraintes qui assurent l’enchaînement d’idées – la cohérence logique requise par la pensée secondaire – et à libérer ainsi la circulation des divagations thématiques tant sur la suite des différentes pensées émises que sur les détours produits par certaines d’entre elles qui peuvent paraître à première vue contingentes ou adjacentes, ce mode de discursivité, à la fois lâche et brisée, facilite en retour, par le desserrement des rapports internes à la communication, une activité qui intensifie des modes de rayonnement à distance entre des parties du discours, comme la poésie et l’écriture littéraire le recherchent délibérément mais de façon contrôlée. Ce qui nous indique que ce rayonnement, suscitant des effets à distance, semble être une capacité de l’esprit humain qui entre enjeu lorsque ce que vise le discours ne peut être énoncé sans faire courir un risque à celui qui s’exprime, ou qu’un discours apparemment errant est plus riche lorsqu’il adopte les formes de la poétique. Les liens entre les mots ont beaucoup plus de capacités sémantiques que la suite des mots elle-même. Ceci met en lumière l’importance de la dimension d’évocation du langage (Lacan) qui échappe à la visibilité, à la continuité et à l’arrangement obtenu par les liens perceptibles dans une logique qui définit ses règles en obéissant aux lois qui régissent les processus secondaires.
Le fonctionnement buissonnant obtenu nous permet de mieux saisir l’originalité de l’entendement analytique. À savoir que, dans le désordre apparent de la communication, ce sont les effets de résonance mutuelle selon le son ou le sens, entre les phonèmes, phrases ou paragraphes, qui donnent du prix à ce fonctionnement. Encore faut-il préciser de quelle manière ce fonctionnement induit la compréhension et l’interprétation de l’analyste. Les associations permettent de repérer, à la faveur de condensations et de déplacements, des noyaux de réverbération rétroactive : à savoir qu’un élément énoncé ne prend véritablement son sens que si, à partir de lui, sont mis en lumière des échos rétroactifs parfois convergents, contenus dans des propos énoncés antérieurement dans la séance, qui témoignent de la persistance du pouvoir significatif de ceux-ci, longtemps après que l’énoncé qui les portait s’est éteint. De même, à d’autres moments, alors que rien ne le laisse présager, certains termes auront des effets annonciateurs, reconnus comme tels a posteriori, sans que l’analyste, au moment où il les entend, ne soit conscient de leur effet d’avertissement, ni n’est en mesure de prédire la forme de ce qui succédera et dont l’avènement ultérieur permettra de déduire leur rapport avec leur précurseur. La portée de ces relations est perçue après coup car la valeur d’anticipation était isolée et ne pouvait laisser pressentir précisément ce qui s’annonçait alors. Ainsi, réverbération rétroactive et annonciation anticipatrice agiront de concert ou, en alternance, nous faisant comprendre que l’association libre nous permet d’accéder à une structure temporelle complexe[2] qui met en question la linéarité apparente du discours pour nous rendre sensibles à une temporalité aussi bien progrédiente que régrédiente, prenant une forme arborescente et, surtout, productrice de potentialités non exprimées ou génératrices d’échos rétrospectifs. S’il en est ainsi, c’est que l’organisation psychique ne cesse de se remanier au fil de son histoire, ce à quoi Freud avait fait allusion, sans en élaborer les implications théoriques, en parlant de l’attraction dans le refoulé préexistant (Le Refoulement).
On le voit, un tel fonctionnement appelle beaucoup plus la figure du réseau que celle de la linéarité, parfois ramifiée dans la coexistence de différentes temporalités, linéaires et réticulaires. D’ailleurs, parmi les ramifications qui entrent dans la figuration du processus, certaines branches peuvent rester muettes parce qu’elles sont l’objet d’un très fort contre-investissement; elles n’en sont pas moins actives dans l’inconscient, susceptibles d’être réanimées ou, dans d’autres cas, de se mettre à exciter d’autres portions du réseau sans s’exprimer explicitement. D’autres paraîtront absentes, le sens ne se développant jamais à partir d’elles, mais suggérant à l’esprit de l’analyste l’idée de leur nécessité pour parvenir à une compréhension minimale et cependant toujours hypothétique. S’il y a intérêt à souligner l’arborescence du sens, c’est que celle-ci permet de passer d’une branche de l’arbre à l’autre, par un trajet récurrent pour revenir ensuite sur les bifurcations ultérieures de la branche d’où l’on est parti.
En conséquence, il faut insister sur la nature des associations qui met en évidence une caractéristique qui, à ma connaissance, n’appartient qu’à la psychanalyse. Nous venons de mettre en question la linéarité des associations qui a cours de manière très générale dans les théorisations linguistiques. Les linguistes disent volontiers que les relations entre les termes rassemblés priment sur le sens des termes eux-mêmes. En outre, du fait de l’infiltration par l’inconscient du discours conscient (désirs et défenses), ce qui veut encore dire de l’effet indirect, invisible et muet des investissements des représentations de choses inconscientes sur les représentations de mots et de la pression exercée par les quanta d’affects qui les connotent et qui commandent leur progression dynamique, le discours associatif est marqué, à certains moments, par ce que j’appelle des effets d’irradiation… Donc certains termes – ou mieux certains moments du discours –, occupant une position stratégique qui ne sera souvent comprise qu’après coup, sont porteurs d’effets dynamiques tels qu’une fois prononcés, et même avant de l’être, alors qu’ils ne sont encore que des pensées non articulées, ils irradient et influencent l’intentionnalité discursive. Ce sont d’ailleurs souvent les mêmes qui, défensivement, engendrent des investissements latéraux. C’est alors qu’ils auront tendance à entrer en résonance, soit avec des termes déjà énoncés, d’une manière rétroactive, soit encore, et parfois simultanément, avec des termes à venir, pas encore pensés, mais potentiellement générateurs de thèmes qui laissent apercevoir de nouveaux rapports avec ce qui a été exprimé. Ils seraient donc ici en position d’indicateurs sous l’effet d’une vibration interne. Nous l’avons vu dans le mouvement, vers l’arrière comme dans celui vers l’avant, lors de l’écoulement de la communication durant la séance, par rapport au déjà dit, comme par rapport à un dire à venir suggérant une virtualité d’existence. Cette conception, que je propose d’appeler du rayonnement associatif, trace à travers le déploiement du discours manifeste, issu de l’association libre, des lignes de force qui le traversent et qui vont constituer les veines du discours inconscient permettant de suivre, de résonner, de rétroagir, d’accueillir d’avance la portée significative qui circule le long des parcours dont le plan se dessine d’après les coordonnées de l’inconscient marquées par les surinvestissements et les contre-investissements qui les accompagnent. Les moments de suspension de l’association ont l’intérêt de signaler les nœuds de la résistance, donc de la pression de l’inconscient, auxquels ils répondent et de rendre sensibles les remaniements auxquels ils procèdent. Cette description sert à mieux saisir les modalités préconscientes de l’écoute par l’analyste du discours en séance avec toutes ses connotations transférentielles et ses récurrences contre-transférentielles.
Dans une telle optique, l’analyste suit une démarche correspondante à ce qu’il perçoit du mode d’expression du patient. Il tente le dégagement du sens véhiculé par la parole à travers ce qu’il a déjà entendu du discours de l’analysant dans la séance, ce qui ne manquera pas de faire écho à des thèmes déjà abordés lors de séances antérieures ou à l’intérieur de celle qui se déroule. En outre, son oreille est aussi attentive à ce qu’il ne peut manquer de se préparer à entendre sur le développement des thèmes exposés par le discours déjà énoncé, dans un parcours brisé, mêlant des temps passés et à venir, suivant une exploration en va-et-vient au sein du déroulement du présent. Ce mouvement d’attente d’un sens à accomplir ne se contente pas le plus souvent d’une seule anticipation ou d’une hypothèse unique qui attend sa réalisation, mais simultanément de plusieurs dont peut-être une seule sera sélectionnée pour stabiliser le sens. Parfois aucune d’elles ne sera validée, toutes devant céder la place à une hypothèse imprévue surgie extemporanément qui résulte des rapports déjà établis par le discours. Les hypothèses antérieures invalidées ne disparaîtront pas complètement, elles seront la plupart du temps mises en latence, pouvant refaire surface à l’occasion ou tomber dans l’obsolescence si rien ne vient les ranimer. Mais de toute manière, la marche de la séance est à la recherche d’un équilibre entre le freinage de la résistance et la poussée de l’inconscient vers la conscience, elle entraîne l’oreille à la réception d’une complexité polysémique ouverte, prospective et rétrospective prenant part à la construction d’une dialectique sémantique processuelle. Procès veut bien dire marche, action d’aller en s’avançant.
Enfin, en parlant des organisateurs de la vie psychique du patient, je fais allusion à ces concepts clés autour desquels se construit l’univers mental du patient. Ils sont pour nous ce que sont les référents chez les linguistes. Il est tout à fait déplorable d’avoir à constater qu’il n’y a pas encore d’agrément, chez les psychanalystes, sur les catégories qu’ils représentent à cause de la fragmentation et de la dispersion du corpus freudien et de l’héritage multiple qui est issu de lui. Ce sera sûrement une tâche de l’avenir de parvenir à un accord sur ce sujet.
Première approche de l’évitement associatif comme manifestation du négatif
Il y a longtemps déjà, j’avais été intrigué par le comportement associatif de certains analysants qui, parvenus à certains moments de la séance, paraissaient tourner les talons à tout le mouvement de pensée qui les avait conduits jusqu’à un certain point de leur discours, alors même que la conclusion de la suite de son avancée paraissait presque prévisible et très éclairante. À l’époque, j’avais fait ces observations chez des patients névrosés et c’est à une résistance que j’avais attribué ce qui m’ apparaissait comme une fuite devant la prise de conscience devant un désir interdit. Par la suite, j’ai été frappé de lire, sous la plume de Bion, le récit d’une situation un peu différente que pour tant je n’ai pu manquer de rattacher à l’observation précédente. Bion parlait de ces cas où le matériel exposé par les patients paraissait fort significatif pour l’analyste sans que pour autant il ne réussisse jamais à faire sens pour l’analysant, même quand il est interprété. Mais ici il s’agissait de patients psychotiques et l’atteinte profonde de leur fonctionnement mental était manifeste. Ceci fut à l’origine, avec d’autres faits remarquables, de la conception, à laquelle le nom de Bion est attaché, d’« attaques sur les liens ». La comparaison d’avec la situation antérieure faisait ressortir qu’alors que dans le premier cas le refoulement se rapportait aux rejetons des pulsions sexuelles principalement, dans le deuxième l’action des forces destructrices sur le Moi était au premier plan. Par la suite, l’intérêt que j’ai apporté au travail du négatif a aiguisé mon oreille en direction des formes de négativité qui ne se laissaient pas interpréter par leur rapport direct aux pulsions destructrices sous leurs formes agressives. Ce à quoi l’analyste a essentiellement affaire dans la relation de transfert avec des patients « limites » est la destructivité qui se porte prioritairement sur le propre fonctionnement psychique du sujet. La destructivité peut n’être affectée qu’aux défenses négativistes dont le clivage freudien est la forme la plus subtile. La communication analytique y est porteuse de contradictions essentielles, vivant en coexistence, sans que l’une domine l’autre, obligeant la pensée de l’analyste à élaborer le produit de son écoute selon des registres inhabituels, déroutants, étranges. Je me suis référé, à plus d’une reprise, à cet écrit inachevé de Freud, « Some Elementary Lessons in Psycho-Analysis », version anglaise de son Abriss, où il prévoyait que l’analyse aurait à connaître à l’avenir des modes de fonctionnement psychique de plus en plus éloignés du sens commun. Ce qui veut probablement aussi dire de plus en plus éloignés de ce que la psychanalyse des névroses lui avait appris et qui fonde le socle de la Métapsychologie. Le travail du négatif[3]s’est efforcé d’en développer les implications cliniques, techniques et théoriques.
Aujourd’hui, je m’attacherai à certaines manifestations « négativistes » dans la cure, qui peuvent se présenter d’une manière dont l’analysant met longtemps à reconnaître la fonction et qui ne s’arrêtent pas une fois qu’il les a admises après leur interprétation, du moins avant un certain temps. Je fais ici allusion au comportement d’un analysant qui vint me voir pour une angoisse chronique. Il avait fait diverses tentatives thérapeutiques qui révélaient, entre autres, son intolérance au silence. Peu de temps après le début de la cure avec moi, qu’il semblait pourtant avoir ardemment souhaitée, et à la suite d’interventions qui m’avaient parues d’autant plus nécessaires par rapport à ses expériences précédentes, marquées par un silence traumatique, il lui arrivait de me répondre : « Je ne vous entends pas, j’ai de la merde dans les oreilles. » Il ne parlait pas de cette surdité comme d’une impossibilité de m’écouter mais bien d’un refus de m’entendre. Dix ans après, au cours d’une séance récente, il me redit à propos d’une interprétation qui n’eut pas l’heur de lui plaire : « Je ne vous entends pas. » Je ne compris pas qu’il exprimait la même opposition qu’autrefois et je crus vraiment que ma voix n’était pas assez audible. Étonnante constance, il avait seulement supprimé la contraction anale métaphorique de son oreille. À la séance suivante, il montra cependant une remarquable capacité intégratrice. Toutefois, cet entendement en dents de scie était resté caractéristique de son fonctionnement, même après des avancées remarquables. La différence tenait dans une capacité de rétablissement de l’insight dont le progrès n’était pas une illusion, mais dont l’exercice devait d’abord être précédé de la compulsion de répétition devenue heureusement transitoire, destinée à me faire perdre pied pour parer à l’imminence du danger que pouvait représenter la vision plus approfondie qu’il avait acquise de ses conflits passés.
Aujourd’hui, il m’apparaît que ces comportements dont j’avais bien compris le but défensif sont à rattacher à des manifestations phobiques. Mais il me restait à passer du plan du comportement, si symptomatique qu’il fût, à ce qui en fait la spécificité et qui fait obstacle à l’intelligibilité analytique: c’est-à-dire que le sens comme émergence de l’association libre dans le rapport transférentiel devient l’objet d’un brouillage et d’une asphyxie quasi systématiques.
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Développements métapsychologiques
Comment comprendre métapsychologiquement ce que la position phobique centrale révèle chez ces patients ? Après avoir avancé dans l’élaboration de ma description clinique, lisant encore une fois, pour un travail différent, « L’Homme aux loups », je retombai sur cette citation bien connue concernant la castration à propos de ce que Lacan a appelé forclusion. « Aucun jugement n’était là porté sur son existence mais les choses se passaient comme si elle n’existait pas. » Cela aussi, comme la phrase de Gabriel, résonna en moi : « Moi, au bord d’un effondrement parce que ma mère n’arrive toujours pas. Ça n’existe pas en moi, ce n’est pas moi. » Et aussi : « Ma mère m’a abandonné, quelle mère ? Je n’ai plus de mère. Elle n’est plus. Elle n’est pas. » Ces issues mettent en évidence le paradoxe d’une culpabilité qui appelle une réparation interminable bien que le sujet se place en position de victime à qui on a fait plus de mal qu’il n’en a .fait. La culpabilité est la conséquence du meurtre primaire dont le but est de procéder à une excorporation de l’objet abandonnique. Des conduites auto-érotiques tenteront de parer au vide laissé par cette évacuation : addictives, alcooliques, boulimiques, ou encore à base de séductions compulsives, tout est bon pour prouver et se prouver que l’objet est toujours substituable, donc destructible – ce qui ne trompe guère le Surmoi à qui le meurtre primaire n’a pas échappé. Un autre paradoxe de cet objet dont la trace se manifeste par le trou de sa présence : ces patients « ont du vide plein la tête », comme l’ont fait remarquer d’autres auteurs (Khan). Voilà donc la caractéristique de cet objet maternel : il ne s’appréhende que dans le vide dans lequel il laisse le sujet et si, en revanche, il vient à manifester sa présence, son fantôme occupe toute la place, il « prend la tête » comme on dit. Au meurtre primaire de l’objet répondra, lors de ses résurrections, l’idée d’une puissance paternelle qui ne peut que s’incliner, tout en déplorant qu’elle ne puisse le dégager de cet emprisonnement fascinant.
Quel type de jugement est ici en question ? « La négation » nous en présente deux : le jugement d’attribution qui décide de la propriété que possède une chose et le jugement d’existence qui face à une représentation doit décider si celle-ci renvoie à une chose qui existe dans la réalité. Aucun des deux ne s’applique à notre cas. Nous ne pouvons considérer qu’il s’agit seulement d’attribuer à la chose la qualité bonne ou mauvaise. L’acte de la supprimer témoigne de ce qu’elle doit être mauvaise mais, comme nous l’avons signalé, l’attachement inébranlable qui la lie au sujet doit laisser penser qu’elle est considérée comme irremplaçablement nécessaire. Que penser de sa représen tation ? Elle renvoie sans doute à un objet qui existe, la mère, mais d’un autre côté, cette représentation la veut morte – non par le seul fait qu’il y a vœu de mort, mais parce que sa représentation a été évacuée, déclarée inexistante, mise à mort, comme par la survenue d’un deuil instantané et accompli immédiatement, sans travail. La disparition de la représentation dans la psyché est rétroactivement aussi brutale que celle de sa non-perception dans le réel. Cette situation est due au fait que le jugement négatif d’attribution ne vise pas, ici, à refouler – ce qui est encore une autre manière de conserver – mais à effacer, à déraciner du monde intérieur. Et de même le jugement d’existence négatif ne se limite pas au rapport à la réalité externe mais à un recours ommipotent qui voudrait se défaire de la réalité psychique. On peut remarquer, du point de vue de cette réalité psychique singulière que, lorsque le patient est attiré par quelque chose à quoi il pourrait aspirer, il semble rarement former un fantasme de désir qui permettrait de connaître sa position subjective. Il fantasme moins qu’il ne fait advenir la chose comme déjà réalisée ; réalisée non au sens d’une réalisation du sujet, mais d’une survenue dans la réalité qui le place moins dans la position de celui qui désire que dans celle de celui qui a déjà agi ou qui est agi par d’autres. Autrement dit, que ceci devrait appeler une sanction, non pour avoir désiré ce qu’il n’aurait pas dû, mais pour s’être retrouvé comme ayant transgressé en acte. Le Surmoi, ici, ne joue pas le rôle que Freud lui attribue, l’héritier du complexe d’Œdipe, il promulgue une punition qui est celle-là même que signifie la transgression accomplie. Ainsi, l’obstination à être le possesseur de la mère qui trouve sa sanction dans la folie accomplit la séparation mais au prix de la ségrégation et de l’exil en le confinant à demeurer parmi ceux qui n’auront jamais accepté la séparation d’avec leur mère à l’asile, selon son interprétation de cette maladie. On peut parler d’un déni de la réalité psychique dans la mesure où de tels patients ne peuvent concevoir leur monde intérieur que comme façonné par les actions et les réactions des autres à leur égard. Toute demande de reconnaissance de leur part ne pourrait que conduire au dévoilement, toujours perçu comme une conséquence de la façon dont on se comportait envers eux, d’une rage destructrice ou d’une sexualité transgressive à l’égard de leurs objets primaires, interprétés par les autres comme signe de folie devant nécessairement entraîner leur mise à l’écart. Le paradoxe est que la position phobique centrale devait veiller à ne pas laisser paraître ce qu’on aurait pu deviner de tout cela et, en même temps, reproduisait cette situation redoutée, lui-même agissant ainsi à l’égard de ses propres productions psychiques qui ne pouvaient pas trouver accès à sa propre conscience. On peut dire qu’il leur faisait violence en considérant que les liens qui se formaient dans son esprit devaient subir une exclusion qui interdisait leur insertion dans des contextes plus étendus, nécessaires à une activité de pensée. Nier c’est ici supprimer ce qui, par sa perception, attente à l’existence du sujet : pour continuer à être, il faut que l’objet qui n’est pas là ne soit plus du tout, sans souci des conséquences de sa perte. Et si la menace sur l’être réussit à faire retour, effractant le barrage des défenses, il faut alors que soit retiré l’investissement des traces qu’il aura laissées. La forclusion dont il le connote, qui se poursuivra par le déni de cette part de psychisme subjectif, aura malgré tout survécu, contestant que c’est ce Moi blessé du passé qui revient hanter le Moi précaire du présent. Aussi, faut-il fuir toujours le regard de celui qui peut deviner dans le regard du sujet les traces d’une mère qui réduit à l’impuissance parce qu’elle n’est plus qu’un fantôme d’objet ou une source d’excitation sans qu’aucun désir ne lui donne sens.
Dans son article sur « La négation », Freud écrit : « Originellement donc, l’existence de la représentation est déjà un garant de la réalité du représenté[4]. » Il faudrait pouvoir dire dans le cas dont nous parlons : l’inexistence de la représentation, sa suppression, est un garant de la nonréalité de ce qui a été forclos, comme si la non-représentation de l’objet suffisait à se débarrasser de la menace qu’il exerce. S’il le faut, c’est le sujet lui même qui s’exclura pour éviter le nouveau meurtre que suggère la réapparition de l’objet qu’on a tué. Ainsi il aura au moins supprimé la douleur qui risque de revenir, attachée à l’investissement premier, originel, basal, primordial. Restera un semblant de sujet qui demeurera la proie des morts et des résurrections de l’objet.
Revenons donc un moment à la forclusion : ce que Freud décrit concerne la séance d’analyse et ce qui y est relaté se rapporte non seulen1ent à ce qui eut lieu dans l’enfance niais à ce qui en resurgit. J’en déduis que la forclusion s’accomplit au temps du retour de l’expérience permettant de l’inférer après coup, donc dans la rétrospection. La forclusion, comme la position phobique centrale, appartient au processus analytique. Elle bloque la générativité associative qui permet le développement de la causalité psychique.
On vit trop souvent avec l’idée que l’importance des conflits prégénitaux pourraient nous amener à tenir pour négligeable le complexe d’Œdipe. Il est à la fois vrai de dire que le complexe d’Œdipe ne réussit pas dans ce cas à organiser de façon centrale la personnalité et vrai aussi de s’élever contre l’idée qu’on pourrait le tenir pour négligeable. Par exemple, on pourra observer que l’angoisse de castration est très présente et qu’on ne saurait la réduire à la forme superficielle d’un conflit plus profond dont elle ne serait qu’un faux-semblant. En revanche, on ne peut parler d’un complexe de castration. Nous avons vu, au cours de l’exposé, que le père peut susciter le fantasme d’avoir, pour ainsi dire, séquestré la mère. Et, cependant, le sujet adulte n’accepte jamais les tentatives maternelles pour éloigner l’enfant du père ; Que celui-ci incarne les interdits, cela est bien présent. Son importance est reconnue et ses efforts pour favoriser l’individuation font l’objet d’une gratitude. Il reste que les sentiments d’hostilité qui appartiennent au cadre œdipien sont ici vécus moins sur le mode de l’enfant en rivalité avec le père que sur le modèle du désir de la mère de l’exclure hors du monde psychique – tentative qui fera l’objet plus tard de douloureux repentirs –, pour être en situation de consonance affective avec la mère. Même quand le sujet parviendra à une réconciliation avec le père qu’il chérira précieusement, celle-ci ne pourra l’aider à mieux comprendre la relation avec la mère. À côté du père œdipien, gardien de la Loi, respectueux de la lignée ancestrale, il est un autre père. Celui qui, dans la psyché même, à la fonction de reconnaître les ruses de la pensée, le détournement de la vérité, le jeu des déplacements parce qu’il les ramène à lui-même, géniteur d’une pensée à la recherche de sa vérité, celle qui connaît la relativité des interdits, leur caractère inconstant, variable, discutable, en le mettant au service de leur critique et de leur contestation, mais qui se fait le héraut de leur reconnaissance comme de leur faillibilité. Telle est la compensation de n’avoir pu s’inscrire dans le psychisme infantile avec l’inégalable pouvoir de participer à la construction d’un univers mental en y engageant toutes les formes de l’intimité la plus profonde, celle des corps en dialogue.
On est frappé chez ces patients, devant les moments critiques qu’ils tra versent, par la simplicité des situations causales – déceptions, abandons, traumas affectifs, blessures narcissiques – et la dissimulation déployée devant les contenus et les affects mobilisés, même quand ceux-ci paraissent « naturels » et enfin l’extrême complication des processus psychiques et des modalités du travail du négatif. Plus c’est clair, plus cela doit être déguisé, plus ça doit paraître incompréhensible.
En fait, ces patients savent que l’analyse est le seul lieu où ils peuvent exprimer leur folie et la vivre sans crainte de trop graves rétorsions. Au-delà de leur déni, de leur énergique tentative pour méconnaître ce que recèle ce fonds ancien qui refait périodiquement surface, au-delà des combats qu’ils mènent dans le transfert contre la reconnaissance de la vérité et où tous les moyens sont bons : oublis, contradictions, culpabilisation de l’analyste, reniements, distorsions du raisonnement, le transfert reste positif car ils doivent à l’analyse d’être restés sains sinon saufs. Freud nous l’a rappelé : nul ne peut s’échapper à soi-même.
Post-scriptum
Depuis sa première présentation ce travail a fait l’objet d’additions, au fur et à mesure de l’évolution de la psychanalyse du patient.
Avant de le clore définitivement, je voudrais faire quelques remarques terminales.
La cure de Gabriel a suivi un cours montrant qu’il ne cessait de s’améliorer. Il put enfin « rencontrer » sa mère et la retrouver, non seulement telle qu’elle était dans son souvenir mais telle qu’il aurait toujours aimé la voir et dont il s’aperçut qu’elle avait aussi été. Désormais je puis dire que l’imago maternelle, l’analyse du transfert aidant, a véritablement été internalisée, sans idéalisation excessive mais avec une pleine reconnaissance des aspects positifs qu’elle lui avait transmis (tout particulièrement dans la sublimation). D’autres signes du tournant dans la voie de la guérison sont apparus. Gabriel a donné des preuves de sa capacité à affronter et à surmonter avec succès des situations devant lesquelles il avait reculé jusque-là.
Il lui est arrivé de me dire non seulement qu’il était heureux de ces réussites, mais, ce qui me paraît non moins important, qu’il se sent maintenant un homme « presque » libre. Qui donc l’est totalement ?
[1] Esquisse d’une psychologie scientifique, dans La naissance de la psychanalyse, publié par M. Bonaparte, Anna Freud, E. Kris, trad. A. Berman, PUF, 1956, p. 342.
[2] A. Green, Le temps éclaté, Éditions de Minuit, 2000.
[3] A. Green, Le travail du négatif, Paris, Éditions de Minuit, 1993.
[4] S. Freud, Résultats, idées, problèmes, t. II, p. 137.