La Revue Française de Psychanalyse

88-4 Résumés des articles

88-4 Résumés des articles

THÈME : TRANSMISSIONS EN PSYCHANALYSE

Jacques André – Transmission de la psychanalyse

RÉSUMÉ – L’histoire de l’APF est une histoire de transmission paradoxale : elle naît d’une rupture d’allégeance à Lacan et notamment un refus de la confusion de l’analyste et du Maître. La transmission de la psychanalyse repose sur les trois piliers de l’analyse personnelle, de la supervision et de l’enseignement. À quelle source puise le devenir-analyste de chacun ? Pas de réponse univoque, le transfert sur la psychanalyse détermine le devenir-analyste de chacun.

MOTS-CLÉS – transmission de la psychanalyse, supervision, Lacan, devenir-analyste.

Françoise Moggio – Place de la transmission dans les traitements mère bébé

RÉSUMÉ – La transmission intergénérationnelle de parent à nouveau-né est souvent au cœur des difficultés qui s’installent entre le bébé et ses parents, principalement la mère qui a en charge les soins premiers. Ses effets sur le développement de l’enfant peuvent nécessiter l’appel au psychanalyste et la mise en place de consultations spécialisées. Nous présentons dans cet article deux situations cliniques autour des troubles alimentaires précoces et de leur impact sur la psyché maternelle pour qui la fonction nourricière est, même dans les situations banales, toujours vectrice d’anxiété, voire de dépression. Le travail thérapeutique mené avec ces dyades nécessite de la part du psychanalyste capacités d’observation des interactions et capacités d’empathie et de mise en mots des douleurs psychiques ressenties et exprimées corporellement par le bébé.

MOTS-CLÉS – transmission intergénérationnelle, fantasmatisation maternelle, interactions précoces, narcissisme parental, Œdipe parental, consultations thérapeutiques, enaction.

Jérôme Glas – Pour qui sonne le glas ?

RÉSUMÉ – L’auteur montre comment l’« équation personnelle » de l’analyste occupe une place centrale dans la constitution de l’objet interne de transfert de l’analysant, nommé ici objet subjectif. Il expose de quelle manière la constitution de cet objet advient en étayage sur une hétérogénéité de processus psychique à l’œuvre, allant de l’investissement de l’objet tangible analyste à l’identification processuelle à son fonctionnement psychique. L’auteur illustre ce processus par le récit d’une cure psychanalytique durant laquelle l’analyste a été victime d’un accident de la route qui l’a rendu paraplégique. L’auteur rapporte comment la modification de son « équation personnelle » au décours de la cure a eu un impact majeur sur les modalités de transfert de l’analysant. Il expose combien la modification radicale de l’ « équation personnelle » de l’analyste a eu valeur d’interprétation en acte et a permis l’élaboration d’enjeux psychiques restés jusqu’alors sous le coup du travail du négatif.

MOTS-CLÉS – équation personnelle, transfert, objet, corps, analyste.

Paul Denis – Transmission de la psychanalyse : résistances narcissiques de l’analyste au processus de supervision

RÉSUMÉ – La situation de supervision des cures psychanalytiques de formation est fertile en difficultés. L’analyste superviseur est dans une situation paradoxale de soutien mais aussi de juge de l’analyste en formation qu’il doit aider. La situation de celui-ci est particulièrement vulnérable s’exposant dans ses premiers pas et tendant à reproduire ce qu’il a vécu dans sa propre analyse. L’autre élément est lié au fait que le supervisé a une conception de la cure psychanalytique qui dérive directement de son analyse personnelle. Celle-ci a été conduite d’une façon qui diffère nécessairement, certes plus ou moins, des options du superviseur, en particulier dans le mode d’interventions et la gestion du cadre. Ce qui peut différer dans les recommandations techniques du superviseur peut apparaitre comme une critique de l’analyse du candidat et compliquer leurs relations réciproques.

MOTS-CLÉS – contre-transfert, émotions, narcissisme, pulsions, scansion, technique, transfert.

Denys Ribas – Enjeux de la transmission et de la formation à la psychanalyse de l’adulte et de l’enfant

RÉSUMÉ – La transmission analytique qui naît de l’expérience de la cure personnelle implique une instance tierce pour la formation à la psychanalyse dans des instituts, justement nommés. La particularité souvent méconnue de la psychanalyse de l’enfant est que la cure de l’enfant n’a pas de fonction de transmission directe intrinsèque pouvant satisfaire l’exigence d’une analyse personnelle comme indispensable préalable au devenir analyste. Des conséquences en sont tirées pour la formation. Les enjeux de transmission et de pouvoir ont structuré le devenir du mouvement psychanalytique. Un rappel est fait de l’histoire de la SPP et de comment le pouvoir des didacticiens de l’Institut a été remis en cause, avec l’abandon de l’analyse didactique et l’intégration des instituts dans la SPP, puis en considérant une fonction de formateur à la place d’un statut à vie. Les dimensions transférentielles et contre-transférentielles existent dans la supervision, lieu privilégié de transmission et de formation.

MOTS-CLÉS – transmission, formation, psychanalyse de l’enfant, histoire de la SPP, supervision.

Bernard Touati – Transmission, l’après-coup d’une illusion

RÉSUMÉ

MOTS-CLÉS

Solange Carton – Transferts – de pensée

RÉSUMÉ – L’article analyse la façon dont la métapsychologie de l’écoute psychanalytique proposée par Daniel Widlöcher a conduit au concept de co-pensée, qui porte sur les mécanismes qui trament la co-associativité en séance. La co-pensée cible, plus que le contenu, la transmission du processus associatif lui-même. L’article en retrace les constituants fondamentaux. Il dégage la valeur d’action intentionnelle qu’acquiert, grâce à l’interprétation, l’acte de parole, au service de l’accomplissement hallucinatoire du désir. L’article insiste sur la passivité, chez l’analyste et chez l’analysant, qui en caractérise les premiers temps, conduisant à un travail inférentiel à partir de l’attention flottante. Sont ensuite questionnées la place du corps qui sourd dans la co-pensée et la fonction d’une forme de co-pensée seconde dans la transmission de la psychanalyse. Une attention particulière est portée aux liens entre transfert et co-pensée, un fragment clinique visant à illustrer leur lien étroit.

MOTS-CLÉS – co-pensée, Daniel Wilöcher, écoute psychanalytique, transfert.

Nicole Llopis – Transmettre l’inattendu

RÉSUMÉ – À partir du thème de la transmission, l’auteur reprend deux situations dans cet article, l’une clinique, concernant la reprise d’une consultation thérapeutique mère/enfant présentée par Françoise Moggio au colloque de Deauville, l’autre plus personnelle, une séquence de supervision de groupe avec Annie Anzieu. Avec l’analyse de ces deux moments, l’auteur reprend un thème développé dans ses travaux précédents : la transmission hors du champ de la parole, de cette part d’inconnu, d’inattendu, associée à la rencontre avec le psychisme de l’autre, envisagée ici de façon nouvelle à partir d’une situation de formation. Si l’impact émotionnel perçu du côté de l’analyste engendre une transmission qui peut passer par l’acte et non par la parole, l’auto-analyse et le travail du contre-transfert offrent la possibilité d’une transformation.

MOTS-CLÉS – transmission, transformation, contre-transfert, supervision, inquiétante étrangeté, tache aveugle.

Piotr Krzakowski – Transmission et équation trans-personnelle de l’analyste

RÉSUMÉ – Ce texte propose un moment clinique qui expose une question paradoxale : pourquoi l’analyste a-t-il failli céder à une demande hors cadre d’un patient avec pour corollaire un sentiment de culpabilité de ne pas l’avoir fait. Le surmoi, dit analytique, est ici convoqué et la liste de ses « visiteurs fantômes » commence avec une lignée remontant à Freud lui-même, dont l’héritage totémique est soumis à des versions toujours en évolution. Ce presque agir de l’analyste suscite un rêve figurant l’importance d’un étayage sur une formation institutionnelle réputée solide, dont les différentes identifications à l’œuvre nous accompagnent en parallèle de notre activité solitaire… La processualité interne de l’analyste s’interroge selon son équation personnelle comme le montre Jérôme Glas dans son article (Glas, 2023), mais aussi trans-personnelle : quand des jambes viennent à manquer, une fonction groupale prothésique et inconsciente prend en charge de faire néanmoins marcher la cure.

MOTS-CLÉS – équation personnelle de l’analyste, transmission, formation analytique, gang interne, équation trans-personnelle de l’analyste.

Alexia Blime – Trans-mission

RÉSUMÉ – Comment articuler deux types de transmission apparemment antagonistes dans le cadre d’un établissement d’enseignement supérieur prestigieux : la transmission de savoirs surinvestie par une population d’étudiants dont la problématique a toujours placé la réussite et la performance au premier plan, et une transmission de type analytique par des psychanalystes, que nous tentons de définir, au sein du service psychologique de cette école ? À partir de l’observation du fonctionnement psychique des étudiants rencontrés, nous avons dégagé trois axes : la constitution d’un faux-self associé à un Idéal du Moi démesuré, une soumission à des figures imagoïques contraignantes et aliénantes, et une difficulté de recours à la passivité et à la régressivité nécessaires à l’accès aux racines pulsionnelles de la subjectivation. Face aux problématiques qui émergent dans cette population, nous tentons de décrire en quoi le cadre spécifique de consultations psychanalytiques tel qu’il est proposé dans cette école peut s’avérer particulièrement ajusté et fécond.

MOTS-CLÉS – idéal du moi, Surmoi, imagos, soumission, passivité, consultation psychanalytique.

Berrnard Chervet – Transmission et appropriation, deux effets marginaux de l’identification fondatrice

RÉSUMÉ – Transmission et appropriation invitent une réflexion sur la dynamique de l’identification, c’est-à-dire la transformation d’une potentialité en une efficience grâce au détour par un autre censé avoir déjà acquis celle-ci. L’identification fondatrice du psychisme, identification à l’impératif d’inscription psychique d’un autre, est soumise à un impératif qui la précède et la soutient. Cette dynamique conjugue deux souhaits, d’appropriation et de transmission, qui s’accomplissent par un acte psychique réalisé au cours des activités psychiques régressives de la passivité, telles que le rêve, le jeu, la libre association. La transmission est une conséquence de ces activités qui utilisent comme supports tous les substrats tangibles des réalités tant internes qu’externes. Cette dynamique peut être suivie dans le développement de l’enfant, dans le travail de la cure et dans la formation des analystes. La transmission apparaît comme un effet marginal du procès fondateur du psychisme.

MOTS-CLÉS – transposition, cooptation, inscription, identification, transmission, appropriation, impératif fondateur, activités psychiques régressives de la passivité.

DOSSIER : LA PSYCHANALYSE APPREND DE LA LITTÉRATURE

Fonction littéraire, fonction psychanalytique. À partir de Lu et entendu, de Michel Schneider

Catherine Ducarre – Une introduction à Lu et entendu, de Michel Schneider

RÉSUMÉ – Entre littérature et psychanalyse, Michel Schneider s’est révélé un remarquable passeur, en maintenant la spécificité de chacune, et au plus loin d’une démarche de psychanalyse appliquée. Il a proposé une méthode d’exploration des œuvres littéraires où l’identification à l’auteur et l’amour porté à l’œuvre, tout autant que l’exigence du travail de pensée dans l’interprétation, ont ouvert un agrandissement d’âme. L’enfant avec sa fantaisie et sa douleur, et les impasses dans lesquelles peuvent l’aliéner les liens avec les êtres qui l’ont en charge, sont au cœur de sa réflexion. Mais dans ces liens s’inscrit aussi, comme pour la relation de Proust avec sa mère, la chance de la créativité littéraire.

MOTS-CLÉS – processus créateur, douleur, enfance, perversion, regard et représentation.

Paul Denis – Psychanalyse et fonction littéraire

RÉSUMÉ – L’œuvre de Michel Schneider est une illustration des liens entre la pensée d’un psychanalyste et celle de l’écrivain qu’il était aussi. Sa façon de penser et de vivre avec la création littéraire a été pour lui complémentaire de son expérience personnelle de l’analyse. L’action élaborative pour le développement de la pensée des contes et des textes littéraires est analogue et parallèle à une partie du travail psychanalytique. L’importance du jeu des représentations chargées d’affect est aussi grande dans l’une que dans l’autre. L’écart est lié au fait que dans la situation analytique le transfert est une expérience vivante avec une personne, alors que le lecteur compose le personnage de « son » écrivain qui lui propose l’intermédiaire de ses fantasmes pour provoquer les siennes. Le psychanalyste soutenant le développement de fantasmes oubliés ou refoulés du patient lui-même. Le texte littéraire peut être considéré comme un médium au service de l’auto-analyse.

MOTS-CLÉS – auto-analyse, désorganisation, fantasme, littérature, processus analytique, rêverie, séduction.

Le séminaire « Interpréter, lire écrire. Psychanalyse et littérature »

Laurence Aubry – Présences de la littérature dans le travail du psychanalyste

RÉSUMÉ – Le séminaire « Interpréter, lire, écrire. Psychanalyse et littérature » s’intéresse à la manière dont la littérature s’invite dans le travail des psychanalystes. Les contributions des intervenants et les échanges avec les participants ont permis d’en dégager quatre modalités. Certaines écritures relèvent de l’auto-analyse, ce qui soulève la question de la différence entre la sublimation et la perlaboration. Lorsque, mis à l’épreuve par le négatif, l’analyste emprunte le détour de la littérature pour élaborer son contre-transfert, il s’identifie d’une certaine manière à l’écrivain. Pour l’analysant, comme, d’autre façon, pour l’analyste, devenir sujet suppose l’invention d’une langue et la reconnaissance d’un style, instituant l’autre comme témoin d’une vie racontable. Dans la séance, il arrive enfin qu’une œuvre littéraire, par la condensation extrême d’éléments pulsionnels que revêt l’expression poétique, fonctionne comme un objet transitionnel. Le séminaire est surtout l’occasion d’un festin littéraire partagé par les frères et sœurs analystes valant par ses après-coups.

MOTS-CLÉS – littérature, écriture, style, auto-analyse, contre-transfert, objet transitionnel.

François Richard – Interprétation psychanalytique et expérience littéraire du présent

RÉSUMÉ – Cet article montre comment l’interprétation psychanalytique et la littérature travaillent, chacune à sa façon, la mémoire, dans une sublimation fragile qui contient un fond mélancolique et un risque de morcellement. Lors de la lecture d’une œuvre littéraire, le lecteur est confronté à sa bisexualité psychique et aux zones les plus archaïques de sa psyché par la poétique du langage, tandis que l’interprétation psychanalytique vise à liquider les clivages et les refoulements les plus pathogènes. Les spécificités du travail psychique mobilisées par le psychanalyste lorsqu’il recherche la bonne formulation, le style, de ses interprétations, sont dégagées – tandis que sont éclairées quelques modalités de présentification du passé infantile par l’écriture littéraire.

MOTS-CLÉS – archaïque, interprétation, lecture, littérature, poésie, sublimation.

Gilbert Diatkine – Les histoires du moi

RÉSUMÉ – Dans Le rouge et le noir, Stendhal apporte une attention particulière aux histoires que se racontent sans cesse ses héros. Leurs fantasmes diurnes conscients contredisent la réalité perçue par les personnages sans entrer en conflit avec elle. Comme Freud l’écrit dans « La création littéraire et le rêve éveillé », Stendhal fait coexister deux aspects clivés du moi de ses personnages, l’un soumis au principe de plaisir, et l’autre au principe de réalité. De plus leurs fantasmes diurnes permettent aux personnages de Stendhal de satisfaire leurs pulsions sexuelles tout en prétendant n’obéir qu’aux exigences de leur surmoi. Les histoires que se raconte le moi inconscient parviennent ainsi à satisfaire chacun de ses trois maîtres : le surmoi, les pulsions du ça et le monde extérieur. Il le fait au prix d’un clivage que Gérard Bayle aurait sans doute qualifié de « fonctionnel ». Freud maintiendra toute sa vie que le moi normal peut se cliver et que le clivage du moi n’est donc spécifique ni des perversions, ni des psychoses.

MOTS-CLÉS – rêverie diurne, clivage du moi, Stendhal, moi inconscient.

Gilberte Gensel – Des interprétations littéraires dans les écrits de Freud

RÉSUMÉ

MOTS-CLÉS

Michel Collot – Gérard de Nerval et l’imaginaire

RÉSUMÉ – L’auteur présente les recherches qu’il a menées sur la place de l’imaginaire dans les dernières œuvres de Nerval en associant les méthodes de la critique thématique à une lecture de type analytique. Il évoque d’abord les problèmes que soulève l’usage de la psychanalyse en critique littéraire, situant sa démarche par rapport à celles de Jean Bellemin-Noël et de Jean-Pierre Richard. Il s’appuie sur les écrits de Lacan consacrés au stade du miroir et à la psychose paranoïaque pour instaurer un dialogue entre approche phénoménologique et lecture lacanienne de l’imaginaire. Elles lui permettent d’éclairer le rôle que jouent la fixation à l’imago maternelle, l’invention d’amours imaginaires et l’identification du sujet à ses doubles dans les derniers textes de Nerval. Il ne s’agit pas de les réduire à l’expression d’une pathologie, mais de comprendre comment leur auteur, en affrontant ses vertiges, a pu ouvrir de nouvelles voies à la littérature et offrir un précieux matériel à la psychanalyse.

MOTS-CLÉS – critique littéraire, psychanalyse, Lacan, Nerval, imaginaire.

Jean-Yves Tamet – « Nous imaginons voir là où il n’y a rien ». À propos d’Aby Warburg

RÉSUMÉ – Quand l’analyse écoute, il se tient au confluent d’influences contradictoires entre ce que les mots du patient brossent comme images et celles qui lui sont suggérées par sa propre imagination. Parler des images et s’ouvrir à ce langage spécifique est donc délicat, car les mots ne peuvent rendre compte pleinement de cette influence sensorielle. Aussi l’œuvre étonnante et polysémique d’Aby Warburg est une illustration bienvenue pour saisir dans les fragments des points de compréhension de la vie psychique en séance. Cette œuvre est née au début du XXe siècle et elle est contemporaine de la démarche freudienne. L’article se veut un parcours discursif qui suit le fil de ses productions en présentant d’abord un aperçu biographique et intellectuel puis en développant des éléments d’un lexique Warburg autour des concepts clés, pour envisager enfin les rapports possibles entre Freud et Warburg.

MOTS-CLÉS – image, Warburg, interprétation, fragments, traces.

RUBRIQUES

Histoire de la Psychanalyse

Baptiste Pouget – L’inconscient des analystes sur la scène épistémologique

RÉSUMÉ – Les Controverses Anna Freud-Melanie Klein peuvent être lues comme un exemple de mise au travail des liens entre histoire et épistémologie en psychanalyse. Elles forment une scène épistémologique traversée par les conflits entre processus primaires et processus secondaires. Les efforts rationnels de clarification rencontrent des mouvements libidinaux et transférentiels inconscients, et les polémiques peuvent être entendues à plusieurs niveaux, selon qu’on appréhende la surface rationnelle des débats ou les enjeux inconscients chez les analystes eux-mêmes. Depuis Freud, les analystes se sont en effet toujours risqués à de telles interprétations de leurs positions inconscientes respectives, le plus souvent par la voie de leur correspondance, qui forme à cet égard une source analytique de premier plan. L’inconscient des analystes est au centre de leurs engagements en psychanalyse, tant dans la clinique que dans les mouvements de théorisation qui les animent.

MOTS-CLÉS – histoire de la psychanalyse, inconscient, raison, controverses, Anna Freud, Melanie Klein.

Technique psychanalytique

Marilia Aisenstein – Quelques notes sur la technique psychanalytique avec les patients atteints de maladies somatiques

RÉSUMÉ – Pierre Marty et Michel de M’Uzan ont pour la première fois décrit la « pensée opératoire » lors du Congrès des Psychanalystes des Langues Romanes de 1962. L’Institut de Psychosomatique de Paris (IPSO), hôpital de jour à l’époque, a été fondé par Simone Veil, alors ministre de la Santé, en 1978. Pierre Marty, médecin directeur, et Michel Fain y étaient très présents ; ce dernier y donnait de nombreux séminaires, essentiellement théoriques, alors que Marty menait les consultations nommées « investigations psychosomatiques » et supervisait toutes les cures menées à l’Institut. L’auteur s’attache à rappeler les enseignements oraux de Marty sur la technique avec des patients dont le fonctionnement est opératoire.

MOTS-CLÉS – Pierre Marty, Institut de Psychosomatique de Paris (IPSO), maladies somatiques, technique psychanalytique, classification, transmission orale.

Psychanalyse et psychose

Anne-André Reille – Bobby Fischer, le roi devenu fou

RÉSUMÉ – Au moment-même où il devient champion du monde d’échecs en 1972, Bobby Fischer décompense, évoquant notamment avant lui Daniel Paul Schreber lorsqu’il fut nommé président de la cour d’appel de Dresde ou encore Paul Morphy, célèbre joueur d’échecs américain au XIXe siècle. Le temps d’une rencontre victorieuse avec l’objet persécuteur désigné (aussitôt constitué et perdu) s’avère celui d’une désorganisation psychotique, entre schizophrénie et paranoïa. Déclenchement, processus et origine de la maladie sont envisagés, où « la perte de la réalité » toujours avancée par Freud en ce qui concerne les psychoses recouvrirait celle de l’altérité (posant la question de la mélancolie mais aussi du type de relation à l’objet) comme de la temporalité et de la spatialité.

MOTS-CLÉS – auto-engendrement, échecs, effondrement, psychose, rencontre.