La Revue Française de Psychanalyse

88-1 Résumés des articles

88-1 Résumés des articles

THÈME : L’HYSTÉRIE, ENCORE ?

Claude Smadja – Le concept de conversion

RÉSUMÉ – La conversion est une notion créée par Freud dans les années 1890 pour spécifier le mécanisme de la formation des symptômes hystériques et leur impact somatique. Elle est liée au destin du quantum d’affect après le refoulement des représentations jugées inconciliables pour le moi. En raison de sa double nature, psychique et somatique, elle se situe au cœur d’une problématique psychosomatique. C’est sur les deux notions de refoulement et de complaisance somatique que repose, pour Freud, le modèle théorique des symptômes de conversion. Parcheminey récuse la pertinence de ce modèle et propose un modèle génétique renvoyant à un stade supposé précoce d’indifférenciation somato-psychique. Il substitue ainsi à la conception d’une dualité de fonctionnement celle d’une identité entre le psychique et le somatique. Pour Pierre Marty, le processus de conversion est interprété comme un mouvement de régression aboutissant à des fixations somatiques pleines d’un potentiel libidinal apte à relancer le mouvement d’organisation psychique. Les travaux contemporains des psychosomaticiens ont prolongé les premières analyses freudiennes des névroses et ont enrichi la compréhension des symptômes de conversion en montrant toute leur complexité.

MOTS-CLÉS – conversion, hystérie, point de vue économique, psychosomatique.

Bernard Chervet – Hystérie et identification hystérique. De la conversion à la contagion

RÉSUMÉ – L’hystérie est au fondement de la psychanalyse, de la découverte de l’après-coup et de l’organisation en-deux-temps du fonctionnement psychique. Elle est caractérisée par la conversion corporelle. Ce processus réussit à relier des motions pulsionnelles inconscientes et des formulations langagières en latence par un accomplissement hallucinatoire de désir ; d’où un langage du corps. Se présentent deux énigmes : celles de l’inscription des pulsions dans le psychisme et du saut du psychisme dans le corps.
La conversion s’implique dans l’installation de la sensualité de l’ensemble du corps et de ses zones érogènes, temps indispensable pour qu’existe dans un second temps la régression sensuelle propre à la vie érotique.
L’identification hystérique nous apprend que les défauts de renoncement impliqués dans l’hystérie sont compensés par des contagions groupales d’éprouvés sensuels et émotionnels. Là où un renoncement manque, une mise en commun et en communauté s’impose. Plus les potentialités de mentalisation de l’hystérie tendent à se réduire, plus la contagion tend à se transformer en psychologie collective, en mutualité narcissique et en communauté de masse.

MOTS-CLÉS – après-coup, conversion, contagion, régression sensuelle, identification hystérique, psychologie collective.

François Sirois – L’hystérie discrète

RÉSUMÉ – Sous la couverture de la notion d’hystérie discrète, le texte élabore la question du contre-investissement dans l’hystérie. Cette question est restée imprécise dans la pensée de Freud en regard du maintien du refoulement dans l’hystérie. La question est élaborée par rapport à deux types de contre-investissements ; celui tourné vers l’extérieur qui caractérise l’hystérie, celui tourné vers l’intérieur comme mécanisme du moi pour se protéger de l’excitation. Le propos avance que dans l’hystérie discrète, la composante du contre-investissement tourné vers l’intérieur en stabilise la présentation, notamment dans une particularité de l’usage du corps. Sur un autre axe, l’hystérie discrète se particularise par une double polarité, celle de la nostalgie du prégénital et celle de l’intrication masochiste.

MOTS-CLÉS – hystérie discrète, contre-investissement, séduction, scène primitive, excitation, masochisme, analité, conversion.

Samuel Lepastier – Suffocation de la matrice, grande hystérie et cure psychanalytique : la permanence des signes

RÉSUMÉ – Cet article analyse le noyau invariant des expressions hystériques. À l’occasion d’une excitation sexuelle non consentie ou, à l’inverse, lorsque l’objet du désir s’éloigne, le sujet « pris aux tripes » ressent une douleur abdominale qui se propage dans l’ensemble du corps alors que s’installe l’angoisse ; des difficultés respiratoires apparaissent qui vont s’atténuant quand il « reprend ses esprits », en s’exprimant dans un discours affecté. Quelquefois subsistent des symptômes permanents pour lesquels est ressentie une « belle indifférence » formant une paire contrastée avec le débordement anxieux de l’accès. Ces troubles sont accompagnés de « lacunes » du psychisme, traduisant l’amnésie. Bien davantage qu’un saut mystérieux du psychique dans le somatique, l’hystérie est une chute du psychique dans le langage. En dehors de la psychanalyse, dont la métapsychologie – théorie la plus générale – est déduite de cette crise, les autres conceptions psychopathologiques ne proposent de modèles pour en rendre compte. Cette méconnaissance est à l’origine d’impasses thérapeutiques aux conséquences parfois dramatiques.

MOTS-CLÉS – accès hystérique, Freud, Charcot, Babinski, Lacan, trouble neurologique fonctionnel.

Jacqueline Schaeffer – Le cas Dora revisité

RÉSUMÉ – L’intérêt de revisiter Dora aujourd’hui, c’est d’interroger ce qui des symptômes et de la structure revient à l’hystérie ou aux affections psychosomatiques. C’est une question qui reste toujours d’actualité, car la personnalité hystérique ainsi que les symptômes qu’elle présente, sa labilité, la multiplication de ses identifications utilisent toutes les couleurs de la psychopathologie et des constructions défensives. Des prolongements actuels questionnent : les jeux hystériques de la séduction et de la jalousie, la haine de la scène primitive, le conflit entre une sexualité infantile hyper-érotisée, autoérotique, et une sexualité génitale contre-investie, les identifications, le masochisme érogène primaire, la complaisance somatique, l’homosexualité et la pseudo-bisexualité. L’analyse du transfert et du contre-transfert est un levier essentiel de la cure de l’hystérique. Ce que Freud n’a pu sentir, ni prévenir, ni interpréter aboutira à l’agir par la rupture du traitement de Dora.

MOTS-CLÉS – phallique, refus du féminin, identification « contre », complaisance somatique, masochisme érogène primaire, confusion de langue.

Mario De Vincenzo – L’hystérie et les affres du désir

RÉSUMÉ – L’article tente de problématiser la question de la demande de l’hystérique qui confronte le psychanalyste aux écueils d’un désir de non-satisfaction. À partir du récit d’une cure, l’auteur met en lumière les paradoxes de cette demande de l’hystérique qui se débat constamment entre un donner à voir à travers ses symptômes et un invisible qui se dérobe.
À partir de l’étude des enjeux transféro-contre-transférentiels et de la phénoménologie des identifications hystériques, ce travail tente de comprendre l’accrochage de l’hystérique à la non-satisfaction comme nécessité de préserver une tension suscitant dans et par l’autre des effets de reconnaissance pouvant répondre à la nécessité de représentations. L’inadéquation consubstantielle entre l’offre et la demande dans les cures des hystériques réactualiserait ainsi la quête impossible d’une relation originaire porteuse de la plénitude et de la reconnaissance que l’hystérique ne cesse de chercher dans le regard de l’autre.

MOTS-CLÉS – hystérie, désir, représentation, reconnaissance, identification hystérique, insatisfaction.

Filippo Dellanoce – Retour aux images freudiennes et à la figurabilité de l’accès hystérique

RÉSUMÉ – Dans L’interprétation du rêve, Freud distingue précisément trois types d’images psychiques : les représentations, ou Vorstellungen ; les figures, ou Darstellungen, et les images de nature hallucinatoire, ou Bilder qui composent le rêve manifeste. La fonction de figurabilité ou mise en figure intervient pour transformer les représentations en images. Puisque, selon Freud, le travail du rêve est le paradigme du travail de formation du symptôme hystérique, nous devons nous attendre à retrouver, aussi dans ce cas, trois types d’images et une fonction de transformation. L’hystérie est, effectivement et selon Freud, une maladie de représentations ou fantaisies sexuelles qui sont mises en figure de manière pantomimique lors de l’accès hystérique. La fonction de figurabilité laisse sa place à la fonction psychique de conversion (Konversion) qui permet le passage du registre représentationnel au registre de la visibilité somatique de l’accès.

MOTS-CLÉS – travail du rêve, figurabilité, accès hystérique, image, représentation.

Claire-Marine François-Poncet – Le modèle de l’hystérie traumatique : un paradigme à l’adolescence ?

RÉSUMÉ – Comment le modèle de l’hystérie traumatique, à l’origine de la psychanalyse, s’applique-t-il à la clinique contemporaine de l’adolescence ? L’auteur interrogera la valeur paradigmatique de ce modèle à l’adolescence en remettant au travail la théorie de la séduction dans des histoires cliniques de jeunes filles désignées hystériques par Freud. Comme ces jeunes filles, les adolescentes d’aujourd’hui affichent dans leur corps l’excès d’excitation subi dans l’enfance. Victimes des mouvements passionnels inconscients des adultes, elles tentent de s’approprier l’histoire des générations précédentes en mettant des mots sur les préjudices infantiles inconscients. L’auteur fera l’hypothèse que la résolution du complexe de castration chez les filles suppose un travail d’intégration de la sexualité infantile, traumatique, au service de la continuité de la vie psychique. Ce travail continue d’être symbolisé dans la culture par l’accès au maternel dans sa transmission des règles qui définissent l’amour.

MOTS-CLÉS – hystérie, adolescence, sexualité infantile, séduction, traumatisme.

François Richard – Les formes du clivage. Un fond archaïque dans l’hystérie

RÉSUMÉ – Cet article envisage les formes folles et dépressives de l’hystérie comme résultant d’un Œdipe primaire fragilisé par le polymorphisme sexuel. Les refoulements et les clivages s’y combinent. L’archaïque anime les logiques de l’hystérie et affecte le contre-transfert du psychanalyste d’une façon spécifique, qui appelle l’interprétation alors même que le langage est insuffisant à représenter la chose dont il s’agit. Au-delà de la conception classique d’un défaut du refoulement appelant en urgence un clivage est faite l’hypothèse qu’une potentialité dissociative est présente dans tout refoulement en vertu de la structure distordue de l’Œdipe primaire. Le cas d’une patiente dissociée à la suite d’un viol et d’une (pré)histoire infantile et familiale psychotisante, illustre la façon dont le contre-transfert est sollicité jusque dans la formulation des interprétations.

MOTS-CLÉS – archaïque, clivage, contre-transfert, forme, hystérie, Œdipe primaire, traumatisme.

DOSSIER : PSYCHANALYSE EN ALLEMAGNE

Erika Kittler, Monique Selz et Philippe Valon – La psychanalyse en Allemagne et en Autriche, des chemins de mémoire contrastés. Minutes d’une rencontre de travail – Entretien Erika Kittler, Monique Selz et Philippe Valon du 7 octobre 2022

RÉSUMÉ – Entretien qui s’est tenu en octobre 2022, après le congrès de la FEP qui avait eu lieu à Vienne. S’il apparaît que les sociétés viennoises ne sont pas encore dans un travail approfondi portant sur les années du nazisme, en Allemagne, un véritable travail a été fait, notamment à la DPV. Qu’est-ce qui différencie encore aujourd’hui la DPG de la DPV ? Sans doute la DPG, qui se vivait comme l’héritière de l’ancienne société psychanalytique allemande, a-t-elle encore de grandes difficultés à se départir de la période du nazisme et de son intégration au sein de l’Institut Göring, où la psychanalyse ne se pratiquait plus (officiellement) et était remplacée par une psychothérapie psychodynamique allemande. Cette forme de psychothérapie persiste encore actuellement, favorisée par le remboursement par les assurances médicales, sorte de « psychothérapie sans Freud ». Aujourd’hui, il s’agirait de revenir à une pratique de l’association libre qui a été totalement supprimée pendant la période de l’Institut Göring. Sont également discutées les relations existant entre les sociétés de psychanalyse et l’État. À noter que l’affaire « Caruso » concerne la psychanalyse autrichienne et pourrait être abordée séparément.

MOTS-CLÉS – DPV-DPG, Institut Göring, nazisme, assurance maladie, État, revenir à Freud.

Philippe Valon – Une rencontre des sociétés psychanalytiques autrichiennes : retour de l’impensé ? Compte rendu d’un atelier de rencontre qui s’est tenu à Vienne lors de la FEP en juillet 2022

RÉSUMÉ – Il s’agit d’une table ronde qui s’est tenue à Vienne, lors de la FEP 2022, en vue de rencontrer les deux sociétés psychanalytiques viennoises, WAP et WPV. La première a été refondée sur les ruines de celle qui existait avant la guerre, quand la seconde a été créée par Igor Caruso, émanant du cercle de travail qui a existé au sein de l’Institut Göring, pendant la guerre. Eveline List a fait un travail sur le parcours de Caruso, qui ne semble pas être bien accueilli par les membres des deux sociétés. L’Association, fondée par Caruso, n’a obtenu son intégration à l’API qu’en 2013. Ce n’est qu’à partir de 1988, après le congrès de Bamberg (1987) qu’il a été possible de commencer à parler de ce qui s’était passé pendant la guerre et le nazisme. Un membre de la société britannique a posé diverses questions sur le devenir des membres autrichiens qui se sont maintenus sous le nazisme, sur les relations entre les deux sociétés viennoises et sur ce qui a pu se transmettre depuis l’Institut Göring. Il a été ensuite question de la création de l’Académie psychanalytique de Vienne, qui s’attache à la formation psychanalytique. La table ronde a été suivie d’un déjeuner avec E. List qui a insisté sur la transmission du mensonge dans les sociétés viennoises qui apparaissent à la fois amies et rivales.

MOTS-CLÉS – FEP 2022 à Vienne, WAP et WPV, Caruso, E. List, Congrès de Bamberg, le mensonge.

Philippe Valon – Mise en perspective de la pensée de James et Eileen Brockman Goggin à partir de leur livre : Mort d’une science juive, la psychanalyse durant le IIIe Reich

RÉSUMÉ – Il s’agit d’un livre portant sur la psychanalyse en Allemagne entre 1933 et 1945 et après, publié en 2001, non traduit en français. Ce n’est que dans les années 1980 qu’a débuté l’étude de ce qui s’est passé pendant ces années du nazisme : « Mort d’une science juive » est le titre du livre, qui est postérieur au livre de G. Cocks et aux travaux de R. Lockot. Pour les auteurs, la psychanalyse est morte pendant cette période. Incompatibilité entre psychanalyse et doctrine politique. Dès 1934-35, les analystes juifs commencent à émigrer. Eitingon quitte l’Allemagne dès novembre 33. En 35, les membres juifs de la société psychanalytique sont contraints de démissionner. Boehm et Müller-Braunschweig prennent la direction. La psychanalyse se nazifie. Voir les articles de Müller-Braunschweig et aussi ceux de Jung, antisémites et racistes. L’institut Göring, la psychanalyse et la science sont des entreprises juives qui doivent être éradiquées. Jones participe au sauvetage des psychanalystes juifs, ce qui doit être différencié du sauvetage de la psychanalyse. Compromis, collaboration et résistance des psychanalystes allemands. Certains le paieront de leur vie. Plank résiste, au contraire de Müller-Braunschweig, Boehm et autres. Après la guerre, Scheunert, ancien membre du parti nazi, participe à la fondation de la DPV avec Müller-Braunschweig. La DPG exclue de l’API quand la DPV est admise presque immédiatement. Enfin, se pose la question de l’éthique de la psychanalyse.

MOTS-CLÉS – science juive, Institut Göring, DPG, DPV, doctrine politique, démission des analystes juifs, compromission, résistance.

Karin A. Dittrich, Wolfgang Schmidt auf Altenstadt – Berlin 1933 : l’uniformisation cachée de la psychanalys

RÉSUMÉ – Après la prise de pouvoir par Hitler en 1933, les membres non juifs de la Deutsche Psychoanalytische Gesellschaft (DPG), Felix Boehm et Carl Müller-Braunschweig ont réussi rapidement à prévenir la menace immédiate de dissolution de l’association. L’objet de cet article est d’examiner comment ce discret et surprenant « salut » de la DPG en tant qu’organisation est devenu possible, par l’entremise d’un membre dirigeant de l’organisation nazie « Alliance de combat pour la culture allemande ». Il sera montré quel était le prix sur l’avenir que Boehm et Müller-Braunschweig étaient disposés à payer, sans en faire un sujet de discussion avec les commissions de la DPG et sans en parler avec les représentants de l’API comme Jones ou Ophuizen, ou avec Freud lui-même : l’exclusion complète à moyen terme des membres juifs de l’association et des racines juives de la psychanalyse. Certes, le retrait de tous les membres juifs de la DPG n’a pas eu lieu avant 1935 et la DPG a survécu jusqu’en 1938, mais le réglage occulte des points déterminants du « développement » futur de la psychanalyse en Allemagne a eu lieu dès août 1933. Après la guerre, Boehm est devenu une figure dirigeante de la DPG reconstituée, alors que Müller-Braunschweig a fondé la nouvelle Deutsche Psychoanalytische Vereinigung (DPV).

MOTS-CLÉS – Berlin, 1933, psychanalyse sans Freud, Troisième Reich, collaboration, Deutsche Psychoanalytische Gesellschaft.

Ludger M. Hermanns – Réflexions sur les relations de groupe entre la DPG et la DPV dans les années 1950-1967

RÉSUMÉ – Dans les années 50, la DPG (Société psychanalytique allemande) et la DPV (Association psychanalytique allemande) se sont concentrées sur des tâches différentes : pour l’une, le traitement des patients et la recherche, pour l’autre, la formation de la nouvelle génération de psychanalystes. Les deux associations cohabitent toutefois dans une coexistence essentiellement pacifique, la métaphore du « couple de jumeaux siamois » indiquant qu’institutionnellement (et inconsciemment) elles ne sont pas encore vraiment séparées. Ce n’est qu’à dater de 1959/60, lorsque la DPG se réveille de son « sommeil de belle au bois dormant » psychanalytique et qu’elle cherche à se rattacher aux instances internationales, qu’on assiste à une lutte acharnée entre les deux associations, la DPV revendiquant le monopole exclusif sur la psychanalyse en Allemagne. Ce n’est qu’au cours de ce processus que la séparation s’est vraiment opérée. Il a fallu attendre le milieu des années 80 pour que soit reconnue l’imbrication réciproque dans une « paranoïa de groupe ».

MOTS-CLÉS – Deutsche Psychoanalytische Gesellschaft (DPG), Deutsche Psychoanalytische Vereinigung (DPV), « jumeaux siamois », internationalisation, paranoïa de groupe.

Bettina Jesberg – Les conférences dites « Nazareth »

RÉSUMÉ – L’article présente les conférences « Nazareth » initiées pour explorer les relations entre les Allemands, les Juifs israéliens et d’autres groupes en relation avec l’Holocauste ou d’autres conflits. Ces conférences ont été créées dans le but de mieux comprendre comment les sentiments et les fantasmes liés à l’identité nationale influencent les relations entre les groupes et comment ils affectent les perceptions du futur. L’article décrit également l’évolution de ces conférences depuis leur commencement en 1994, en élargissant leur thème pour inclure d’autres groupes et en se déplaçant dans différents pays. L’auteur fait part de ses expériences personnelles, mettant en lumière les défis et les prises de conscience qu’elle a rencontrés, elle souligne l’importance du travail psychanalytique dans la compréhension des conflits intergroupes et la nécessité de promouvoir le dialogue pour prévenir de futurs cycles de haine et de violence.

MOTS-CLÉS – conférences Nazareth, identité nationale, holocauste, conflits internationaux.

RUBRIQUES

Études métapsychologiques

Clarisse Baruch – Le temps du Préconscient

RÉSUMÉ – Les vécus d’identité, d’écoulement du temps et la mémoire entretiennent des rapports métapsychologiques étroits. Freud les a étudiés dans différents textes, amenant en particulier l’atemporalité de l’inconscient et la non-durabilité de la mémoire dans la conscience, sans les situer explicitement dans le sas intermédiaire, le préconscient. De courtes vignettes cliniques montrent comment s’organise si différemment le vécu temporel en fonction de l’organisation psychique : temps gelé de la psychose, temps accéléré de la manie, témoignant d’un préconscient dysfonctionnel, temps long de la symbolisation intégrant la durée de l’absence et le temps de la latence. Un préconscient fonctionnel rend possibles les trajets de l’inconscient au conscient, dans les deux sens, amenant porosités et souplesses à l’ensemble du psychisme. Le monde fantasmatique s’y développe également, en s’appuyant sur l’expérience de la discontinuité. Mais cette discontinuité n’est tolérable que si un mécanisme de liage temporel relie les évènements psychiques au cours du temps, comme les notes discontinues se regroupent en musique. C’est alors que l’écoulement du temps, les images mémorielles et le sentiment d’existence peuvent dans un même mouvement psychique permettre un vécu de continuité.

MOTS-CLÉS – temps, identité, mémoire, temporalité, préconscient, liage.

Spiros Mitrossilis – Compulsion de répétition et temps

RÉSUMÉ – L’auteur décrit le moment d’un processus analytique dans lequel, partant principalement de son contre-transfert, il est amené à formuler des constructions concernant le passé non historicisé, et perdu, de son patient. Après avoir revisité la notion de temporalité à travers deux versions de la répétition, il se concentre sur la répétition compulsive qui semble appartenir au présent et renvoyer à la non-constitution d’un passé. Il fait l’hypothèse que des traumatismes primaires avaient empêché l’inscription de véritables représentations inconscientes, aboutissant à une confusion temporelle et à une répétition dans une actualité sans fin. Les constructions plus que les interprétations introduisent l’historisation dans la psyché. Lors du travail de construction, le contre-transfert passe au premier plan, et l’analyste participe plus directement à la survenue même de l’après coup dans le psychisme de l’analysant.

MOTS-CLÉS – compulsion de répétition, constitution des traces, construction du passé, expérience hors temps, historisation, survenue de l’après-coup.

Psychanalyse et psychosomatique

Albert Blanquer-Laguarta – « Le symptôme de notre bête est intelligent »

RÉSUMÉ – Cet article prend comme point de départ la phrase de Michel de M’Uzan, « Le symptôme est bête », qui devrait devenir le « symptôme de la bête », de notre animalité. À partir des interrogations de Pierre Marty sur la localisation de certaines somatisations et sur les conflits intra-utérins dans l’allergie, ainsi que les apports de Christophe Dejours et Claude Smadja, nous comprenons la pathologie somatique comme étant une construction de la pulsion lorsqu’elle ne peut pas viser une issue psychique ou comportementale à sa tension conflictuelle. Son parcours somatique futur serait orienté dès l’origine par les interactions entre le programme génétique du bébé et l’inconscient maternel personnel et transgénérationnel. Des fixations somatiques dues aux maladies vont se produire au long de la vie, sorte d’ancrages présymboliques, expression d’arrêts dans la progression évolutive de la pulsion, mais sujettes à la possibilité d’interprétation et de résolution.

MOTS-CLÉS – évolutionnisme, bête, présymbolique, Pierre Marty, travail de somatisation.